Lorsque des élèves perdent des dizaines d’heures de cours à cause d’un professeur absent non remplacé, le droit à l’éducation est directement menacé. Alors, si une procédure d’urgence (référé) peut permettre d’obtenir rapidement la nomination d’un remplaçant, il reste nécessaire d’engager une action en indemnisation pour réparer le préjudice subi. Cette démarche vise à obtenir une compensation financière, proportionnelle aux heures perdues et aux conséquences scolaires ou morales.
1. Le principe de l’action en indemnisation
L’action en indemnisation est une procédure engagée en fin d’année scolaire, lorsque les absences prolongées n’ont pas été compensées. Ainsi, elle repose sur un constat simple : chaque heure de cours perdue est une atteinte au droit à l’éducation.
Concrètement :
- Les familles recensent toutes les heures perdues.
- Elles transmettent ces informations dans leur dossier, accompagnées de preuves (ENT, attestations, emails).
- Le cabinet Pitcher Avocat saisit ensuite le tribunal administratif compétent pour réclamer une indemnisation.
👉 Pour comprendre le rôle complémentaire du référé, consultez “En quoi consiste l’action en référé en cas de professeur absent non remplacé? ”.
2. Comment est calculée l’indemnisation ?
Les montants sollicités devant les tribunaux suivent une grille indicative, qui reflète la gravité du préjudice :
- 10 € par heure perdue dans le second degré (collèges, lycées),
- 50 € par journée d’absence dans le premier degré (maternelles, primaires).
Ces sommes ne sont pas symboliques : elles reconnaissent que chaque heure de cours a une valeur et que l’État doit rendre des comptes lorsqu’il n’assure pas ses obligations.
3. Une double portée : financière et symbolique
L’action en indemnisation ne vise pas seulement à obtenir une réparation financière. Elle a également une portée symbolique et politique :
- elle rappelle à l’État son obligation d’organiser le service public de l’éducation,
- elle met en lumière les carences du système de remplacement,
- elle exerce une pression pour améliorer le recrutement et la gestion des enseignants.
En ce sens, chaque décision de condamnation contribue à renforcer la défense collective du droit à l’éducation.
4. Exemples de décisions obtenues par les familles
- TA Orléans, 18 février 2025 – Lycée Léonard de Vinci (Amboise)
Un élève de seconde a été privé de 49 heures de cours de français entre janvier et mai 2023, faute de remplacement continu. Le tribunal a reconnu une carence prolongée de l’administration et condamné l’État à verser 750 €, répartis entre l’élève (préjudice scolaire) et son parent (préjudice moral). - TA Orléans, 18 février 2025 – même lycée, autre élève
Une élève a perdu 58 heures d’enseignement de français. Le juge a condamné l’État à verser 500 € à l’élève et 300 € à son père, reconnaissant à la fois le préjudice scolaire et moral. - TA Paris, 14 février 2025 – Collège Marie Curie (Paris 18e)
Un élève de 4e a subi 98 heures de cours manquées (anglais, histoire-géographie, EPS, allemand). Le juge a condamné l’État à verser 980 € pour atteinte au droit à l’éducation. - TA Paris, 28 avril 2023 – Collège Marie Curie
Un élève de 6e a perdu près d’un mois de cours de français. Bien que le remplacement ait été assuré tardivement, le juge a reconnu un préjudice et condamné l’État à verser 1 000 € au titre des frais de procédure. - TA Paris, 19 novembre 2024 – Collège Gérard Philipe (Paris)
Un élève de 5e a perdu 101 heures d’enseignement dans plusieurs matières (anglais, histoire-géographie, arts plastiques, SVT, français, etc.). Le tribunal a condamné l’État à verser 1 010 € pour préjudice scolaire.
Ces décisions montrent que les juges prennent au sérieux l’atteinte au droit à l’éducation causée par les absences prolongées de professeurs non remplacés.
5. La preuve, un élément essentiel pour obtenir une indemnisation
Une action en indemnisation n’aboutit que si les familles peuvent apporter des preuves précises :
- heures perdues documentées par l’ENT ou des emplois du temps,
- attestations d’élèves ou de parents,
- correspondances avec l’établissement ou le rectorat,
- déclaration sur l’honneur.
Plus le dossier est complet, plus les chances d’obtenir une indemnisation sont élevées.
👉 Pour savoir comment constituer ces preuves, consultez “Comment prouver l’absence de professeur et le non remplacement ?”.
6. Quand engager l’action en indemnisation ?
En règle générale, l’action en indemnisation est introduite en fin d’année scolaire, lorsque le préjudice peut être pleinement évalué. Cependant, rien n’interdit de préparer le dossier au fur et à mesure, en recensant les heures perdues et en conservant toutes les pièces justificatives.
Il est recommandé d’agir rapidement après la fin de l’année scolaire, afin de ne pas laisser les délais de recours s’écouler.
Conclusion
L’action en indemnisation constitue un levier puissant pour obtenir réparation lorsque les absences prolongées de professeurs non remplacés privent les élèves de leur droit à l’éducation. Elle permet non seulement d’obtenir une compensation financière proportionnelle aux heures perdues, mais aussi de rappeler à l’État ses obligations en matière de service public.
Les décisions rendues par les tribunaux montrent une tendance claire : la justice reconnaît de plus en plus fréquemment la faute de l’État et condamne les carences de remplacement. Engager une action en indemnisation, c’est donc défendre l’intérêt de son enfant tout en participant à une mobilisation collective pour une école plus juste et plus efficace.














